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COLAS/HERVÉ FABRE

Les travaux publics s’engagent pour le climat
FNTP

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Pour prendre pleinement sa part dans la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), la FNTP a présenté une démarche inédite à l’échelle d’un secteur d’activité en France avec les cabinets Carbone 4 et Utopies. Pour la première fois, l’empreinte carbone d’un secteur professionnel dans son ensemble, réunissant 8 000 entreprises et 300 000 salariés, a été mesurée, faisant apparaître que la construction des infrastructures représente 3,5 % des émissions de COen France.

ENGAGEMENT DES ENTREPRISES POUR LA DÉCARBONATION DE LEURS CHANTIERS
De nombreuses entreprises du secteur se sont déjà engagées individuellement dans la voie de la transition écologique, mais les études conduites par les cabi­nets d’expertise indépendants ont per­ mis de bâtir une trajectoire de décarbonation pour toutes les entre­ prises de travaux publics, petites et grandes, visant à atteindre 40% de réduction des émissions de CO2 du sec­teur d’ici à 2030, par rapport à 1990.

Un « mode d’emploi » 
Destiné aux entreprises et aux donneurs d’ordre (État, collectivités locales, grands opérateurs tels que la SNCF, EDF, GRDF…), il a mobilisé près de 200 experts (collaborateurs des entreprises, des maîtres d’ouvrage, des maîtres d’œuvre, des syndicats profession­nels…) et a permis d’identifier sept grands leviers d’action dans les domaines de l’énergie, des matériaux, du numérique et de la maintenance.
Par exemple : 

  • Accroître l’efficacité énergétique et améliorer la logistique en renouve­ lant la flotte de véhicules légers pour moitié en véhicules électriques ou hybrides d’ici à 2030. 
  • Augmenter l’usage des combus­ tibles alternatifs par rapport aux com­ bustibles fossiles en ayant recours aux biocarburants de synthèse. 
  • Généraliser le dispositif de stop- and-start sur les véhicules et engins afin de mieux gérer sur les chantiers les ralentis, représentant 30 % de leur temps de fonctionnement. 
  • Mobiliser de nouvelles techniques pour décarboner le béton en ayant recours à des approches performan­ tielles et des formulations alterna­tives, ou via l’introduction de granulats recyclés.

Un comité de suivi 
Réunissant des représentants clés de l’écosystème des travaux publics et des personnalités et organismes extérieurs, un comité de suivi va également être mis en place. Il assurera en transparence le pilotage de la trajectoire de décar­ bonation du secteur.

PLAN D’INVESTISSEMENT INÉDIT DANS LES INFRASTRUCTURES 


La FNTP s’est parallèlement lancée dans un chantier ambitieux d’évaluation des émissions carbone générées par les usages des infrastructures que les entreprises sont amenées à construire et à entretenir. 
En d’autres termes, elle a souhaité cal­ culer, avec l’appui du cabinet d’études Carbone 4, l’ensemble des émissions de CO2 liées, par exemple, à la combus­tion du carburant des véhicules sur le réseau routier, à la propulsion des trains, des bateaux et des avions, à la produc­tion et à la consommation de l’électri­cité, du gaz, de l’eau et autres fluides, ainsi qu’à l’utilisation des réseaux numériques (figure 1).

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Répartition des émissions carbone. L’ensemble de ces calculs prend en compte les émissions carbone ayant lieu sur le territoire français, ainsi que les émissions dites « importées » (matériaux et matériels produits hors du territoire national).
Répartition des émissions carbone. L’ensemble de ces calculs prend en compte les émissions carbone ayant lieu sur le territoire français, ainsi que les émissions dites « importées » (matériaux et matériels produits hors du territoire national).
CARBONE 4


5 grands enseignements à retenir
1. Pour la première fois, les émissions de CO2 liées aux usages des infrastruc­ tures ont été calculées. Le résultat est éclairant : elles pèsent pour moitié dans l’empreinte carbone de la France, ce qui signifie que la transi­tion écologique de notre économie t de notre société doit s’accom­ pagner d’une politique de transfor­ mation des infrastructures pour atteindre les objectifs climatiques. 
2. Ce plan propose une approche globale de la transition écologique : en plus de constituer un levier pour réduire les émissions de CO2 de la France, les investissements proposés contribueront à la restauration des milieux naturels et à la préservation de la biodiversité, au déploiement des stratégies de captation du carbone, à la protection et l’adaptation des territoires pour faire face aux conséquences du dérèglement climatique.
3. L’investissement dans les infrastruc­tures constitue un levier d’action considérable sous­exploité par les pouvoirs publics, au niveau national comme local, pour assurer la transi­tion écologique. L’effort d’investisse­ ment additionnel a été évalué en moyenne entre 16,2 et 29,9 Md € par an, avec un effort important en début de période, quelle que soit la vision de la société portée : même dans un scénario de sobriété impliquant une forte réduction des usages, il faudra investir massivement dans les infrastructures pour accompagner les changements dans les années à venir. 
4. Cet effort d’investissement devra être porté par l’ensemble des acteurs : l’État, les collectivités locales, les grands opérateurs et les entreprises privées. 
5. À la clé, il permettra de réaliser la moitié de l’effort nécessaire à l’atteinte de la neutralité carbone, de créer jusqu’à 1,3 point de PIB addi­ tionnel et près de 400 000 emplois sur la période, dont la moitié hors travaux publics. 

Quatre types d’investissements essentiels pour la transition écologique
1. Amélioration de la maintenance afin d’augmenter la durée de vie des infrastructures et d’en décarboner l’usage. 
2. Réduction des émissions de CO2 liées à l’usage en permettant les mobili­tés bas carbone, en facilitant l’usage des énergies décarbonées et le développement du numérique.
3. Restauration des milieux naturels par la désartificialisation des sols et la création de puits carbone. 
4. La résilience des territoires face aux aléas climatiques (lutte contre les inondations, préservation de la zone littorale…).

Mettre fin aux idées reçuesJusqu’à ce jour, et hormis l’émergence ponctuelle de la notion d’infrastructures vertes, la compréhension du rôle des infrastructures dans la transition écologique est restée un angle mort du débat public – souvent oubliée, mal ou partiellement identifiée, confondue notamment avec le secteur du bâtiment, jamais évaluée dans son ensemble sur une base scientifique. Évaluer l’empreinte carbone glo­ bale des travaux publics, sur la base de données objectives et transpa­ rentes, est essentiel pour éclairer la décision publique comme celle des donneurs d’ordre à l’origine de la programmation et des commandes d’infrastructures.

PRIORITÉS D’ACTIONS


Forte de ces travaux, la FNTP propose aux candidats à l’élection présidentielle de se prononcer sur 9 priorités d’actions à mettre en œuvre dans le prochain quinquennat. 

Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre
Action n° 1
Établir un plan d’investissement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre avec une part significative por­ tant sur les infrastructures pour décar­boner leurs usages. Les études ont mis en lumière un besoin d’investissement additionnel estimé à 10 Md € par an au cours de la prochaine décennie dans les domaines suivants : pistes cyclables, rénovation et maintenance du réseau routier, électrification des grands axes, infrastructures de recharge, renouvel­ lement et développement du réseau ferroviaire, relance du fret, transports collectifs urbains, transports fluviaux, aériens et ports maritimes.

Action n° 2
Adapter le mix énergétique pour pour­ suivre la décarbonation de la production énergétique et faire face à un possible accroissement des besoins de consom­ mation : entre 4 et 5 Md € d’investisse­ ments supplémentaires par an au cours des 10 prochaines années seront néces­ saires pour la production (hors nucléaire), le transport et la distribution d’électri­ cité, de biogaz et d’hydrogène.

Pour restaurer les milieux naturels
Action n° 3
Engager un plan de restauration des milieux pour favoriser la biodiversité et la captation de CO2. En particulier : 

  • convertir 50 % des friches indus­trielles à horizon 2030 ; 
  • végétaliser les villes à raison de 320 à 540 ha par an ; 
  • renaturer les cours d’eau (5 000 km par an) ; 
  • renaturer les haies en milieu agricole.

Pour adapter les territoires face aux changements climatiques
Action n° 4
Lancer rapidement un programme national d’anticipation des risques climatiques, afin de disposer de données actualisées solides sur cet enjeu majeur et d’identifier les besoins d’investissement aux niveaux local et national. 
En particulier : 

  • accélérer la lutte contre le stress hydrique qui menace les populations, l’industrie et l’agriculture ; 
  • multiplier par deux les efforts de renouvellement des infrastructures de canalisation d’eau, accroître l’effort d’investissement de plus 2,2 Md € par an et développer la réutilisation des eaux usées traitées ; 
  • rendre obligatoire un cahier de maintenance pour l’ensemble des ouvrages d’art et digues en France. 

Pour accélérer la réussite de ces actions
Action n° 5
Assouplir le cadre budgétaire euro­péen pour faciliter les investissements pour les projets de transition écolo­ gique et les projets d’interconnexion européenne. 

Action n° 6
Définir une programmation des inves­ tissements au niveau national et déter­ miner les modalités de leur déclinaison locale. 

Action n° 7
Déterminer les sources de financement nécessaires et les outils mis à la dispo­ sition des acteurs locaux.

Action n° 8
Faire de la commande publique un levier de la transition écologique. 

Action n° 9
Accélérer les procédures et rationaliser les voies de recours des projets à utilité environnementale. 

Revue RGRA