Excellente idée que de consacrer un numéro de la RGRA à l’innovation. Cela pour au moins quatre raisons : l’innovation technologique est au cœur du secteur des infrastructures, contribue à l’atténuation des émissions carbonées et à l’amélioration de la résilience des systèmes de transport et des territoires, et stimule la compétitivité des entreprises françaises, mais elle doit pouvoir bénéficier de la pérennité de ressources financières publiques.
Le secteur des infrastructures est trop souvent perçu comme « traditionnel », alors qu’il est en pleine mutation technologique et n’a rien à envier en matière de technologies de pointe à bien d’autres domaines. De quoi attirer sans nul doute les jeunes talents.
Ces innovations sont la clé de la contribution du secteur à deux immenses défis : l’atténuation par la maîtrise des émissions carbonées tout au long du cycle de vie et des ressources nécessaires (eau, matériaux) et l’adaptation pour améliorer la robustesse et la résilience des systèmes de transport et, à travers ceux-ci, de nos territoires. L’innovation fait sens, comme le montrent les exemples de ce numéro fortement tournés vers ces enjeux.
Les travaux publics, notamment pour les plus grandes opérations, étant un terrain de concurrence exacerbée, les innovations sont la condition de la compétitivité des entreprises françaises, et donc de leur survie. Aujourd’hui, nous avons des champions mondiaux, mais rien n’est jamais acquis et cela se construit chaque jour. Et cela se construit collectivement, comme les projets nationaux, voire les macro-projets, animés par l’Irex (voir l’article sur le PN ISSU et le lancement du PN IDEE, sur lequel nous reviendrons certainement bientôt), le suscitent.
Les ressources financières publiques sont rares et précieuses. En période difficile, la bonne logique est de couper dans les dépenses jugées moins prioritaires, parmi lesquelles on compte malheureusement les crédits de soutien à l’innovation. C’est une erreur majeure.
Le pari erroné est que les entreprises pourront y pourvoir par des efforts supplémentaires, car c’est leur condition de survie. C’est ignorer que les marges dégagées ne permettent dans ce domaine que très peu d’autofinancement de la recherche-développement : les acteurs du secteur ne peuvent assumer cette ambition seuls.
Une politique publique ambitieuse est de privilégier les dépenses créatrices de valeur économique et de cohésion sociale. Dans le domaine de la création de valeur économique, le meilleur investissement possible est l’innovation, et singulièrement les processus collectifs d’innovation, même avec leur part de risque d’échec inhérente même à l’audace créative.
En ces temps d’âpres discussions budgétaires, les crédits dédiés aux pôles de compétitivité sont sur la sellette alors qu’ils sont indispensables à l’animation et au montage de ces projets collectifs et au lien entre les grandes et plus petites entreprises dans cette aventure. C’est la survie de notre jeune pôle de compétitivité du génie civil, Infra2050, qui se joue.
Gageons que la raison l’emportera !